Nous étions une vingtaine d'éleveurs
ce matin pour accompagner Fabienne Fleury, devant le tribunal de
proximité de Valence. La présidente du groupement Pastoral du Grand
Delmas (Montagne de Couspeau) dans la Drôme, était poursuivie par
le parquet pour « blessures involontaires sans ITT par morsure
de chien de type pâtou ».
Début août, un randonneur parisien en
villégiature dans le Pays de Bourdeaux, s'est rendu à la
gendarmerie pour porter plainte contre le propriétaire des chiens,
suite à une morsure survenue le matin même lors d'une randonnée
qu'il avait entrepris avec un ami. Il déclarait alors avoir été
mordu par trois des six chiens présents qui assuraient la protection
du troupeau. Le groupement pastoral réuni trois troupeaux ovin
appartenant à trois exploitations différentes qui amènent
également leurs chiens de protections. Le plaignant n'a pas été en
mesure d’identifier quels étaient les chiens responsables.
Les audiences se sont succédées pendant la matinée entière, nous laissant dans une totale incompréhension sur notre présence en ce lieu. La question principale que nous nous posions étant « mais qu'est ce qu'on fait ici ». Entre toutes les affaires de stationnement, de portable au volant, de sens interdits ou de triangles de signalisation, notre morsure de pâtou semblait bien surréaliste.
Nous n'étions, hélas, pas au bout de
notre surprise. En effet, le plaignant qui lors de son audition par
les gendarmes, avait déclaré ne pas vouloir se porter partie
civile, a visiblement changé d'avis. Il a écrit au tribunal,
demandant 800 euros de dommages et intérêts. C'est son droit. Mais
il demande également l'euthanasie des trois chiens incriminés et à
défaut de pouvoir les identifier, des six présents. Pour une
morsure sans ITT (autant dire une égratignure) six chiens qui font
leur boulot devraient donc passer par le poison. Quel sens de la
mesure.
Viens enfin le moment de l’audience
et l'entrée en jeu de notre avocat, Maître Bern, qui a déjà
plaidé plusieurs fois sur ce sujet. Son argumentation fut claire.
En l'absence d’identification des
chiens responsables , impossible d'identifier le propriétaire et
donc il n'y a pas lieu de poursuivre.
Les chiens de protections sont là,
imposés par l'état dans le cadre des mesures de protections contre
la prédation et financés en grande partie par lui. Ils sont donc en
quelque sortent des fonctionnaires. Les éleveurs n'ont pas a être
tenus pour responsable des éventuelles morsures qui découlent de
leur fonction.
Il ne peuvent pas être « de
gentils toutous qui lèchent la main du randonneur et de féroces
gardiens qui chassent le loup. » Ce sont des mercenaires qui
passent des nuits entières sous tension.
Depuis le retour du loup le monde de
la montagne a changé et on ne peut plus y pratiquer ses activités
comme avant. Chacun doit en assumer sa part de responsabilité. Les
pâtous deviennent l'un des dangers objectifs de la montagne comme
les chutes de pierres, les orages...
Le président du tribunal, sensible à
ces arguments à décidé de la relaxe de Fabienne Fleury. De fait la
demande du plaignant est rejetée.
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