mercredi 16 octobre 2013

Courrier de soutien à Didier Trigance et aux éleveurs alpins


Ci dessous la lettre de soutien de l'ADDIP lu par votre serviteur devant le tribunal:

 
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L’ADDIP est une fédération qui regroupe toutes les associations des départements pyrénéens opposées à l’ensauvagement de leur massif dont les introductions d’ours slovènes sont le tête de pont. Pour l’Ariège, cette association est l’ASPAP.

Je devais être là avec vous pour apporter de vive voix à Didier et à tous ceux confrontés au désastre des loups le soutien de leurs amis pyrénéens de l’ADDIP dans cette lutte face au mépris dont nous sommes tous victimes : quelle autre profession en France accepterait de voir ainsi sans cesse remis en cause son savoir, ses outils de travail et le produit de ce travail – un troupeau c’est les deux ? Quel travailleur accepterait de voir ainsi sans cesse attaquées et méprisées rien moins que ses raisons profondes de vivre et travailler, de voir bafoué tout ce qu’il aime et le motive : « Il faut respecter l'homme et son travail ! », disait Didier, après l’incident ?

 

Si je ne peux pas être là aujourd’hui, c’est exactement pour les même raisons. L’ASPAP organisait hier une conférence de presse pour rétablir la vérité à propos d’une attaque d’ours sur l’estive de Pouilh, en Ariège, dans la nuit du 7 au 8 septembre. Plus de trente brebis dérochées, d’autres directement tuées ou blessées. Sans parler, comme chez vous, des conséquences pour les autres brebis en fin de gestation : l’une d’ailleurs, blessée dans sa fuite, avait avorté des trois agneaux qui gisaient à côté d’elle là où elle fut retrouvée. L’éleveur concerné a fondu en larmes au spectacle.

A la demande du GP de Pouilh et de son berger une quarantaine d’éleveurs représentant quasiment tous les GP de l’Ariège étaient venus apporter leur soutien lors des constats et crier leur refus de cet avenir sauvage.

 

A la suite de quoi Ferus et l’ADET-Pays de l’Ours accusèrent ce berger de ne pas prendre soin des troupeaux, de mal les soigner et les protéger alors qu’il est un de maîtres du pastoralisme ariégeois, choisi depuis des années pour former à cet exigeant travail les apprentis bergers. A la suite de quoi encore, et plus grave, Mme la Préfète du département a organisé une conférence de presse où elle s’est permis de traiter de « gens vulgaires et irrationnels », les éleveurs venus ainsi soutenir moralement le berger et les éleveurs affectés.

Mais ce n’est pas tout. Sur la base d’informations incomplètes, Mme la Préfète a affirmé qu’il n’y avait pas de preuve d’attaque directe, que les bêtes seraient indemnisées « au bénéfice du doute », alors que le même constat mentionne à la fois des bêtes dérochées et d’autres présentant directement, je cite : « des traces de morsures accompagnées d’hématomes et des marques sur la peau. »

Il fallait rétablir la vérité, c’était l’objet de notre conférence de presse hier soir qui m’empêche d’être à vos côtés aujourd’hui.

 

Le même mépris donc pour celles et ceux pour qui ce bétail c’est toute leur vie. « Nous, on est d’abord des animaliers, disait le berger de Pouilh, un crash de cette ampleur, ça te démoralise complètement. On se sent impuissant. » On se sent, mais on ne l’est pas : et la solidarité des GP ariégeois telle qu’elle s’est manifestée sur l’estive est un des éléments essentiels de notre force commune pour résister à cet avenir inhumain que certains voudraient nous imposer.

 

Il y aurait beaucoup à dire sur l’origine de cet ensauvagement que nous sommes en fait collectivement en train de faire vaciller sur ses bases, je le dis clairement même si parfois l’on peut avoir l’impression inverse.

Beaucoup à dire aussi sur ceux qui voudraient nous condamner à cet avenir, sur les positions de l’Europe, sur celles de la France, sur leur évolution, sur ce qui se passe dans d’autres pays et notamment en Espagne où contrairement à ce qu’on raconte, non, rien ne se passe bien avec les loups : une des banderoles en tête des manifestations qui ont eu lieu tout cet été dans les Asturies proclamait : « une administration avec de la volonté et des couilles trouvera des solutions – Nous voulons des éleveurs pas des prédateurs ».

 

Ce serait bien trop long. Simplement ceci : vous n’êtes pas seuls, nous ne sommes pas seuls. Nous avons déjà commencé à tisser des liens entre nous, au niveau de l’Europe aussi. C’est en continuant à affirmer clairement cette communauté d’intérêt, à expliquer et expliquer sans cesse la réalité de nos vies et de notre travail, expliquer et expliquer sans cesse comment ces milieux montagnards si beaux sont au même niveau le fruit de ce que la nature permet et du pastoralisme, c’est en continuant tout cela que nous allons vaincre ensemble : vaincre, parce que oui, c’est une guerre, oui notre résistance est totalement justifiée, et, oui, ensemble nous allons vaincre cet ennemi commun.

 

ADDIP, 9 octobre 2013

 
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