Association Solidarité Pastorale Association des Eleveurs et Bergers du Vercors
Mairie de Dieulefit. 26220 DIEULEFIT Voirazier
La Bergerie du Collet 26 100 ROMANS
26460 Les Tonils
Romans le 30 Octobre 2011
Objet : IP/11/95 du 27/01/2011
Législation en matière d’environnement
dans le cadre de la protection des loups
Monsieur J POTOCNICK
Commissaire Européen chargé de l’Environnement
Monsieur le Commissaire,
La Suède durant deux hivers a autorisé la chasse aux loups se mettant ainsi en infraction avec les règles européennes sur l’environnement.
Pour satisfaire à ces règles, le gouvernement suédois a récemment modifié sa position et aura à l’avenir plus fréquemment recours à une « chasse de protection. »
Pour des raisons différentes à celles des Suédois, les éleveurs Français des Alpes confrontés à cette véritable calamité qu'est la présence du loup au sein de leurs troupeaux souhaitent également une régulation effective des populations de loups.
Chaque année, sur le seul massif alpin Français, (rejoint depuis Août 2011 par les Vosges, le Jura, le Haut Doubs,) plus de 4000 animaux domestiques disparaissent et leur nombre va croissant d'année en année malgré des mesures de protection qui s'avèrent peu efficaces et surréalistes à mettre en œuvre. Cette situation met en péril de nombreuses exploitations. Des éleveurs ovins, en particulier, abandonnent la profession.
L'Etat français est matériellement incapable de mettre en application la législation Européenne et nationale existante, notamment l'article L 131-1 du Code Rural garantissant la pérennité de nos exploitations.
Le pastoralisme existe en France depuis des millénaires selon des recherches archéologiques.
Depuis des siècles, l’élevage est pour nous une activité économique, sociale et environnementale incontournable, indispensable et reconnue.
Depuis des siècles, l’entretien du paysage est le fait des éleveurs, des bergers et de leurs troupeaux.
Notre milieu Alpin est un lieu de vie, de culture, de travail et un espace de production.
Depuis quelques décennies, il est également un lieu touristique où il existe une bonne harmonie entre bergers et randonneurs qui participent aussi à la cohésion sociale et au développement économique.
Notre présence et l'action de nos bêtes assurent le maintien et le développement d'une biodiversité riche en faune et en flore. Nos pratiques respectueuses de l’environnement contribuent à la sauvegarde d’espèces botaniques rares, au maintien de tout un peuple de mammifères, d’insectes, d’ongulés sauvages, d’oiseaux, etc.….
La disparition de l’élevage, consécutive à des mesures de protection des loups, excessives et aveugles
refusant tout principe de régulation réaliste, causera, à court terme, des ravages à la biodiversité mais aussi
à la vie sociale et économique.
L'aggravation des risques naturels tels que les incendies et les avalanches sera en corrélation avec la raréfaction des pratiques d’élevage. Les paysages se refermeront, la friche ne sera plus maîtrisée et par
voie de conséquence le tourisme sera atteint. Imaginez, un seul instant, le coût environnemental, social
et économique pour la société qu'occasionneront ces transformations pour le maintien d'une seule
espèce dont nous savons que même au niveau européen elle n'est pas en danger.
« Les défenseurs du loup ne sont-ils pas en train de faire un choix emblématique parmi
diverses configurations possibles de la biodiversité ? »
E ARNOU Conseiller Régional Rhône-Alpes au sein du groupe des verts, Vice-président du Parc Naturel Régional du Vercors en 2003
Sacrifier notre élevage, c’est sacrifier le modèle originel de l’agriculture durable qui produit une nourriture de qualité et de proximité. Favoriser les importations, les transports internationaux, l’élevage hors sol, l’agriculture intensive, est-ce bien ce modèle que l’Europe préconise ???
Nous avons protégé nos troupeaux à la demande de l’Etat français pour respecter des engagements européens en particulier la directive « Habitats » (directive 92/43/CEE).
Une telle démarche a nécessité, pour nous, de profondes transformations de nos pratiques ancestrales mais aussi économiques. De 246 contrats de protection en 2004 nous en sommes actuellement à 885. Nous avons accepté des règles qui nous paraissaient pourtant aberrantes, trop contraignantes, trop coûteuses, peu efficaces, ni écologiques ni démocratiques.
Pour quel résultat ? Toujours plus de prédations.
Nous avons introduit des chiens de protection malgré la responsabilité juridique et morale qui nous incombe et que nous sommes seuls à assumer.
L'Etat français, malgré ses obligations juridiques (Cf. Code rural) et sous la pression des lobbies environnementalistes totalement incompétents en matière d'élevage, en persistant à appliquer de façon stricte la législation Européenne, condamne les éleveurs Alpins.
Depuis les premières attaques en 1993, l’administration dénombre, officiellement 36 367 victimes …et en cette seule année (2010), tous les records sont battus avec 4189 bêtes officiellement tuées et la liste des espèces touchées ne cesse de s’allonger chaque année : ovins, caprins, équins, canins, volailles…
Même l’administration française s’accorde à reconnaître ce chiffre comme fortement sous-évalué. Il disparaît en moyenne autant de bêtes domestiques que celles qui sont reconnues victimes.
Les mesures de protection, dont l’efficacité est loin d’être démontrée au vu des bilans de dégâts chaque année en augmentation, entraînent des modifications de pratiques aux conséquences inestimables.
Nous ne pouvons pas continuer à vivre ainsi, avec la crainte permanente de trouver tous les matins nos brebis massacrées, ou pire encore, vivantes mais blessées de manière insoutenable au point que nous devons les achever sur nos alpages sans avoir les moyens de prendre les précautions minimum de bien-être et de respect de l'animal.
Nous assistons, impuissants, à un massacre renouvelé chaque année et le préjudice ne peut, en aucune manière, être compensé par une quelconque indemnité financière.
Ce raisonnement purement comptable, aussi bien de l'administration française que des associations écologistes n’est pas le nôtre.
Nos bêtes, même si elles sont destinées à un moment à l'abattoir afin de nourrir les humains, sont des êtres vivants. Nous avons conscience de leur sensibilité, de la souffrance qu'elles supportent du fait des morsures et du stress lors des attaques. Nous avons des devoirs envers elles, entre autres, celui de garantir ce que le législateur a même cru bon de légiférer, et que l’on nomme actuellement le « bien-être animal ».
Ce « bien-être animal », pour nous éleveurs en milieu extensif, c’est d’abord d’assurer une nourriture abondante à nos bêtes, et leur sécurité : ne pas les laisser se faire attaquer, égorger, éventrer …..
Les éleveurs qui n’ont qu’une seule revendication : pouvoir exercer leur métier en paix, sans loup, au profit de la biodiversité.
Plus de 20 ans après la signature de conventions Européennes (devenues obsolètes ?) la notion d’espèce protégée en ce qui concerne le loup doit être désacralisée et la population doit être gérée lorsque sa pullulation génère des dommages environnementaux.
La France est le seul pays à appliquer avec la plus grande rigueur les règlements Européens.
Les protocoles de tir de loups, très difficiles à mettre en œuvre, s’avèrent inefficaces.
En 8 ans, 8 loups seulement ont été prélevés alors que les arrêtes ministériels autorisaient un prélèvement de 6 loups par an et 8 en 2009. 38 loups auraient donc dus être prélevés en 8 ans si la rigueur excessive de mise en œuvre des protocoles de tir, et les recours des associations écologistes, ne rendait en fait cette législation inapplicable. De plus, toute tentative de légitime défense est sévèrement punie, et l’atteinte aux droits de l’homme est manifeste au bénéficie des droits du loup.
Pourtant il est un principe fondamental dans notre République : « le principe absolu de la priorité de l’homme, de ses activités et de ses traditions sur l’animal fût-il protégé ». L’Etat français doit protéger les biens et les personnes.
De 2 loups arrivés en 1992 dans le Mercantour, ils sont au moins 200 en 2010 (source officielle de ONCFS) soit une augmentation de 29 % par an.
Dans la mesure où le loup n’a pas de prédateur (l’homme étant désarmé par les règlements européens), l’augmentation de la population de loups sera inversement proportionnelle à celle des éleveurs.
La responsabilité des règlements Européens est ainsi engagée.
Les directives européennes doivent évoluer, les loups ne sont pas menacés d’extinction par contre les éleveurs en France comme dans les pays Européens ayant signés la directive « Habitats », sont en grande difficulté. Notre réalité de terrain, trop méconnue, est grave.
Nous persistons à affirmer qu’il faut réguler l'espèce dont le nombre d'individus n'est pas en adéquation avec sa capacité naturelle à se nourrir.
Nous affirmons que :
- La vie pastorale est incompatible avec la présence des loups
- Que les mesures dites de protection des troupeaux sont inefficaces et n’empêchent pas une prédation croissante sur les troupeaux ; elles génèrent un surcoût financier et un surplus de travail pour les éleveurs sans aucune contrepartie, pas même la reconnaissance.
- Que la responsabilité juridique des chiens de protection ne doit pas échoir aux éleveurs dans la mesure où l’usage de ces chiens a été préconisé par les autorités publiques.
- Que la dynamique de population des loups montre que l’espèce n’est pas en danger d’extinction et qu’il faut modifier le statut de « canis lupus » dans le cadre de la convention de Berne et de la directive « Habitas ».
- Qu’une réelle gestion des populations de loups par les Etats doit être une urgence prioritaire.
Vous avez maintenant connaissance de la réalité des problèmes rencontrés par les éleveurs et les bergers Alpins et bientôt Pyrénéens, de leur détresse, de leur découragement.
Ils affirment leur détermination et de leur profond attachement à leur métier.
Lorsqu’une directive est inadaptée, qu’avec le recul des années on peut juger de sa dangerosité pour une profession, il faut avoir le courage politique de la dénoncer et de la modifier.
Veuillez croire, Monsieur le Commissaire, à l’assurance de notre profonde considération.
Le Président Le Président
Jean-Louis FLEURY MICHEL CURT
Un courier similaire a été envoyé a:
Monsieur DACIAN CIOLOS Commissaire Européen chargé de l’Agriculture
MONSIEUR LE JUGE COUR DE JUSTICE EUROPEENNE
Réunion "Comité départemental loup" 04 de fin d'année:
RépondreSupprimerhttp://www.ledauphine.com/environnement/2011/11/17/vers-une-augmentation-des-quotas-de-prelevement
Tres bonne idée que de s'adresser à l'Europe et "faire feu de tout bois".
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